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Parler de la culture d’un groupe humain (ethnie, nation voire aire culturelle), c’est parler des phénomènes matériels et immatériels qui distinguent ce dernier. La culture caractérise donc le groupe humain qui l’a produite. Mais cela n’exclut pas qu’un socle culturel commun à l’humanité, soit à l’œuvre dans chaque culture.
Phénomènes matériels et immatériels, disons-nous. Parmi eux, nous pouvons citer le patrimoine naturel (il est investi de significations par le groupe), la langue, les arts (musique, danse, littérature, sculpture, théâtre, peinture, cinéma, etc.), les techniques et autres usages du groupe humain concerné. C’est dire si la culture est largement affaire de production humaine (d’ordre matériel et immatériel).
Or, produire suppose de penser, car on ne produit pas sans réflexion. Cela suppose aussi de sentir, car chaque groupe humain sent le monde, l’éprouve avec sa subjectivité dont il marque ainsi sa production culturelle. Cela suppose encore de croire, car chaque groupe a ses croyances religieuses et philosophiques qui ne sont pas sans impact sur son rapport au monde et partant sur sa production culturelle. Cela suppose enfin d’agir, car sans action, point de traduction dans les actes de ce qui est pensé, senti et cru.
En d’autres termes, la culture d’un groupe humain est, au-delà de ses manifestations matérielles et immatérielles, une manière de penser, de sentir, de croire et d’agir dudit groupe, bref sa manière d’être au monde.
Alors, dans un pays comme le nôtre, où plusieurs groupes ethniques forment le corps social, faut-il parler de cultures (avec s), ou de culture nationale (sans s) ? N’y a-t-il pas autant de cultures djiboutiennes que de communautés nationales ?
A cette question, il peut être donné un premier élément de réponse qui consiste à rappeler la proximité (originelle, historique, géographique, économique, religieuse, etc.) des deux principaux groupes ethniques du pays, Somalis et Afars, mais aussi la proximité (géographique, historique, religieuse, économique, etc.) de ces deux communautés avec d’autres communautés djiboutiennes telles que les Yéménites ou les Soudanais, pour ne citer que ces derniers. Cette proximité intercommunautaire crée une certaine part de ressemblance en soi.
A cet élément de réponse, il peut en être ajouté un deuxième qui consiste à pointer l’expérience commune vécue par les différentes communautés djiboutiennes depuis la colonisation à l’intérieur de nos frontières actuelles. Sans ignorer que chaque communauté compte d’autres membres vivant dans les pays voisins. Cette expérience partagée sur notre sol national a renforcé la part initiale de ressemblance en soi entre les communautés nationales. Elle constitue un surcroît de ressemblance en soi qui est perceptible par l’observateur extérieur mais aussi par nous-mêmes lorsque nous nous auto-observons. Quel (le) Djiboutien (ne) n’a pas pris conscience, d’une manière ou d’une autre, de sa différence de Djiboutien (ne) à l’occasion d’un séjour parmi les membres de sa communauté vivant de l’autre côté de la frontière, en Somalie, en Éthiopie, au Yémen, etc. ? Qui n’a pas eu droit à son ‘’Il (elle) est de Djibouti, ou ‘’C’est un (e) Yaakhi ?’’, ou à une autre formule identificatoire le (la) renvoyant à son pays, Djibouti ?
De ces deux éléments de réponse, il ressort que la culture djiboutienne est à la fois au pluriel et au singulier. Elle est au pluriel car elle est constituée de plusieurs cultures communautaires proches. Elle est au singulier grâce à la ressemblance en soi qui unit les Djiboutiens au-delà de leur diversité communautaire.
Malheureusement, la culture djiboutienne (à la fois singulière et plurielle), n’a pas bénéficié de la volonté politique de promotion qu’elle mérite depuis notre Indépendance nationale de juin 1977. La chape de plomb politique qui s’est abattue sur le pays à travers le système du parti unique (ou parti-État), autour du Rassemblement populaire pour le progrès (RPP), s’est accompagnée d’une chape de plomb culturelle. En dehors de productions asséchantes à la gloire du prince (chansons, poèmes, tableaux de peinture, etc.), l’expression culturelle a été muselée à Djibouti. A l’école, où ni les langues djiboutiennes ni les autres éléments de la culture nationale ne sont guère enseignés, comme dans le reste de l’espace national, la culture est demeurée parent pauvre. Que plus de 44 ans après l’Indépendance, il n’y ait toujours pas de droits d’auteurs effectifs et que nos artistes (célèbres ou non) survivent et meurent dans la misère, en dit long sur la politique culturelle de l’État-RPP. A cet égard, il est éloquent que le gouvernement (à travers son ministère de la culture, des affaires musulmanes et des biens waqfs) ait attendu l’année 2019 pour affirmer vouloir élaborer une politique culturelle nationale. Une annonce qui plus est sans réelle volonté politique, ni vision porteuse !
Devant cette situation peu enviable, le MRD réitère ses vues politiques en la matière et, comme il l’a toujours fait, propose de :
- Préserver le patrimoine culturel et la diversité des expressions culturelles, ce qui implique notamment la création de véritables musées (à commencer par un vrai musée national) et autres centres de conservation, en région comme dans la capitale ;
- Mettre en place de vrais lieux de formation aux métiers de la culture : métiers de comédien, de musicien, de peintre, de sculpteur, de danseur, de cinéaste, etc.
- Multiplier les lieux et occasions de création culturelle : créer en nombre suffisant des maisons de la culture dans les villes comme dans toutes les localités rurales, avec une vraie animation culturelle, afin de développer le goût du beau, du message et de leur création ;
- Organiser, à intervalles réguliers, des festivals, expositions, concours de création culturelle, et créer des bourses de création culturelle mais aussi des formes de résidence culturelle ;
- Revoir les droits d’auteurs pour les rendre attractifs et effectifs ;
- Promouvoir un dialogue culturel fécond entre la ville et la campagne de manière à ce que les citadins découvrent ou redécouvrent les trésors ancestraux ainsi que leurs porteurs et s’en nourrissent positivement. Sans négliger l’apport positif des citadins aux ruraux afin que ces derniers s’approprient les aspects stimulants et enrichissants de la culture urbaine ;
- Intégrer la culture dans les stratégies de développement nationales ;
- Promouvoir une économie de la culture génératrice d'emplois et de revenus ;
- Mettre en place un cadre juridique et institutionnel favorable au développement du secteur de la culture ;
- Développer le mécénat culturel et de toutes autres formes de saine contribution de la société civile (à commencer par sa composante économique) à la politique nationale de renouveau culturel ;
- Enseigner et valoriser les arts et la culture dans le système éducatif djiboutien, notamment dans un esprit d’interconnaissance (l’enfant gagne à connaître les différentes cultures de son pays, langues comprises) et de reliance nationale. Il s’agit de permettre aux Djiboutiens de se vivre comme tels dès la petite enfance sans renoncer à leurs racines particulières. Cela implique notamment d’aménager des lieux de socialisation culturelle en quartier (jardins pour enfants, aires de jeux, etc.) et d’offrir des programmes de même nature sur les médias (radio, télévision, réseaux sociaux, etc.).
- Renforcer la coopération culturelle bilatérale et multilatérale, notamment pour soutenir la diffusion internationale des produits culturels djiboutiens, source de rayonnement pour le pays.
L’éducation est une question à la fois de savoir, de valeurs et de culture. En effet, éduquer est de faire en sorte que le public visé, souvent jeune, parfois moins jeune, acquière du savoir, s’approprie des valeurs et s’enracine dans une culture. Autrement dit, l’éducation ne se réduit pas à l’instruction qui, elle, est centrée sur le savoir.
Cela explique que, dans le monde moderne, le terme éducation se soit substitué à celui d’instruction. Ainsi, l’organisation mondiale spécialisée en la matière, se nomme : Organisation des Nations-Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture, ce qui donne l’abréviation Unesco en anglais.
Plus précisément, la dimension savoir (ou instruction) de l’éducation renvoie au savoir théorique et au savoir pratique ou, en d’autres termes, au savoir, au savoir-être et au savoir-faire, qu’il soit local ou plus global. Elle est centrée sur un contenu à enseigner et à apprendre qui, en passant du registre du savoir objectif (ou objectivé) à celui du savoir intériorisé par l’apprenant, devient connaissance pour ce dernier. De sorte que les connaissances sont des savoirs détenus par le sujet humain qui les a intériorisés. Pour sa part, la dimension valeurs (une valeur est ce à quoi l’on attache de la valeur, de l’importance), transmet à l’apprenant des repères et induit des usages (ou comportements considérés comme les meilleurs par la société concernée). Englobante, la culture dont l’éducation est un lieu privilégié, peut se définir comme la manière d’être au monde de la société concernée.
Pour aller plus avant, disons que, dans le savoir, il y a des éléments universels, partagés avec le reste du monde, tels que les mathématiques, les sciences dites exactes (biologie, physique et chimie), les sciences de la santé ou celles humaines et sociales (ethnocentrisme mis à part), ou encore le savoir sur les activités physiques et sportives. Mais il y a aussi, dans le savoir, d’autres éléments tels que l’histoire et la géographie du pays, sa ou ses langues, sa littérature, ses autres arts, bien que cela n’exclue pas l’ouverture au reste du monde sous ces mêmes aspects.
De même, il y a dans les valeurs (que l’on peut aussi définir comme de grands principes moraux), celles universelles, c’est-à-dire des valeurs communes à l’humanité, comme par exemple la liberté, la vérité, l’amour, la solidarité, ou encore la justice. Il y a aussi des valeurs plus spécifiques à la société concernée et qui fondent ses usages particuliers. Bien entendu, chaque société éduque ses membres aux deux types de valeurs qui sont autant de repères pour la vie et qu’elle pose en normes sociales, c’est-à-dire en règles et usages dont la transgression est socialement sanctionnée. De sorte que l’intériorisation des valeurs et normes d’une société contribue, chez ses membres, au sentiment de ressemblance en soi et de différence avec les autres.
On le remarque, savoir et valeurs ne sont pas sans lien avec la culture de la société qui éduque. En effet, la culture, ou manière d’être au monde, est étroitement liée aux manières de penser, de sentir, de croire et d’agir. Manière d’agir sur soi, sur le monde, et de les transformer. Manière de sentir, c’est-à-dire de saisir par la subjectivité, soi et le monde. Manière de penser, c’est-à-dire de saisir par la raison, soi et le monde. Manière de croire (en termes de croyances religieuses et de convictions philosophiques). Insistons : la culture d’une société n’est pas pure de tout contact avec d’autres cultures, ni dénuée d’éléments universels. De plus, la culture en tant que phénomène englobant, ne peut se réduire à la somme de ses manifestations concrètes. Elle ne se réduit pas à l’addition des produits communicables de ses manières de penser, de sentir, de croire et d’agir (pensée, musique, littérature, théâtre, danse, croyances diverses, valeurs et autres techniques) car elle est aussi et surtout une sorte de force, souvent inconsciente, qui travaille ses porteurs (les femmes et les hommes) et que ces derniers travaillent.
Qu’en est-il, donc, de l’éducation à Djibouti ? il y a, à Djibouti, deux formes éducatives. Il y a l’éducation dite traditionnelle de type pastoral qui se fait par et dans la vie. Elle prédomine en milieu rural où les enfants des pasteurs nomades continuent d’être éduqués sur le mode immersif à dominante orale. Il y a également l’éducation scolaire introduite par la colonisation qui, elle, prédomine en milieu urbain.
Or, si l’éducation ‘’traditionnelle’’ repose sur notre savoir ancestral ainsi que sur nos valeurs et notre culture, l’école est, elle, centrée sur un savoir écrit, institué par l’administration coloniale puis repris par l’État postcolonial au titre de l’éducation nationale. Même si certaines tentatives gouvernementales de réforme scolaire peuvent être repérées, l’absence dans les programmes de deux de nos grandes langues maternelles (afar et somali) ou de la morale ‘’traditionnelle’’, pour ne citer que ces dernières, montre que l’école reste largement à djiboutieniser. Elle nous pose la question de la transmission du savoir, des valeurs et de la culture locaux.
Dès lors, il y a urgence éducative à Djibouti.
Face à cette urgence, le MRD propose de :
- Organiser un débat national pour repenser et unifier notre double éducation (l’éducation endogène et celle scolaire d’origine exogène) en une éducation réellement nationale ;
- Prendre ainsi en compte, dans le système éducatif, notre éducation dite traditionnelle afin que nos enfants, à la ville comme à la campagne, s’approprient en classe, à côté du savoir global (sciences et techniques partagées à travers le monde), le savoir local, nos valeurs et normes sociales, nos langues, nos arts (littérature, musique, danse, théâtre, etc.), notre histoire, notre géographie, toutes choses qui reflètent notre culture ;
- Garantir la qualité des enseignements-apprentissages et l’accès de tous à l’éducation, notamment par la formation des enseignants et une stratégie pédagogique qui prenne en compte notre imaginaire éducatif endogène ;
- Accroître les ressources allouées au système éducatif dont il faut assurer la gestion efficace, efficiente et transparente à tous les niveaux ;
- Développer la recherche éducative : sur l’éducation endogène, sur l’école, sur les articulations entre les deux formes éducatives ;
- Associer à la gestion du système éducatif toutes les parties prenantes : parents, élèves, enseignants, chercheurs, administrateurs de l’éducation, politiques, religieux et autres acteurs de la société ;
- Exercer une veille éducative permanente, notamment par la mise en place d’un véritable observatoire de l’éducation nationale.
L’enseignement supérieur a longtemps été absent du paysage éducatif djiboutien. Longtemps, le lycée d’État de Djibouti était au sommet de l’enseignement local officiel. La première offre locale d’enseignement supérieur date de 1990. Elle émane du Centre de formation du personnel de l’Éducation nationale (CFPEN) qui absorbe l’École normale des instituteurs. Le CFPN propose un DEUG (Diplôme d’études universitaires générales) de lettres destiné à former des professeurs de français en collège avec l’appui de l’université française de Grenoble. Vont suivre, dans la décennie 1990, une offre de formation supérieure courte proposée par le lycée d’État et sanctionnée par le BTS (Brevet supérieur de technicien) et un DEUG du CFPEN pour former des professeurs de mathématiques en collège.
C’est seulement en 2000 que s’ouvre le Pôle universitaire de Djibouti (UD) qui devient Université de Djibouti (UD) en 2006. De cette offre d’études universitaires, des milliers de jeunes ont bénéficié. Pour autant, l’université n’est pas à l’abri des critiques. Ses propres enseignants chercheurs pointent ses insuffisances dans un courrier adressé au ministre de tutelle le 16 novembre 2020. Ils pointent ‘’des dysfonctionnements multiformes, notamment relevés par divers rapports gouvernementaux’’ et qualifient l’UD de ‘’grand lycée’’. L’université de Djibouti a donc du chemin à parcourir pour parvenir au niveau des meilleurs établissements mondiaux.
De même, la recherche reste largement à développer. Pour l’heure, elle est limitée à deux institutions : le Centre d’études et de recherches de Djibouti (CERD) et l’Université de Djibouti. Mais même au CERD et à l’UD, la recherche apparaît encore embryonnaire. Au CERD, les chercheurs sont peu nombreux et les moyens à disposition limités. A l’Université de Djibouti, la recherche ne semble pas être une priorité puisque les enseignants chercheurs parlent d’’’absence d’une véritable stratégie de développement de la recherche universitaire’’ et de ‘’motifs de verser immédiatement dans le pessimisme’’.
Notre volonté politique en la matière de remédier à cette situation et de donner à l’enseignement supérieur et à la recherche toute leur place.
Concrètement, nous entendons :
Mettre en place un conseil national inclusif de l’enseignement supérieur et de la recherche : sa voix doit compter à tous les niveaux de la politique publique en la matière ;
Développer l’offre d’enseignement supérieur en qualité comme en quantité ;
Garantir à tous l’accès à l’enseignement supérieur ;
Développer la recherche à l’université, au CERD et ailleurs, notamment en la dotant de moyens suffisants et en valorisant le statut du chercheur ;
Faire de l’enseignement supérieur et de la recherche un pôle d’excellence, un levier majeur de développement et une source de rayonnement régional et international pour notre pays.
La santé, cela n’est un secret pour personne, est la vie. Parce que nous ne sommes pas à l’abri de la maladie, quelle que soit notre condition sociale, nous ne pouvons point nous passer de préserver notre santé et de la rétablir lorsqu’elle est atteinte.
Le service de santé est donc, dans un pays, un service de première nécessité. C’est pourquoi la santé constitue l’une des fonctions fondamentales de l’État. Dit autrement, un État sans système de santé digne de ce nom est un État qui manque à une obligation première.
Or, un système de santé ne tombe pas du ciel, il se construit, ce qui requiert des ressources et des moyens. L’État doit allouer les ressources financières nécessaires à la santé publique de manière à la doter à suffisance de professionnels de valeur et décemment rémunérés (personnel médical, paramédical et technico-administratif), de locaux et d’équipements de qualité, de produits et accessoires de qualité, ainsi que d’une gestion efficace. Il doit garantir l’accès de tous à cette santé publique, l’accès des jeunes comme des moins jeunes, des démunis comme des autres. Il doit veiller au maintien à niveau de la santé publique, ce qui exige de la prospective, c’est-à-dire de prendre en compte les évolutions de la société et du monde (notamment aux plans démographique et technologique, etc.). L’État doit, enfin, développer la santé préventive, notamment par la médecine préventive (bonne couverture vaccinale, bonne hygiène du milieu, etc.), et en éduquant la population aux comportements sains : sport, alimentation équilibrée, lutte contre le tabagisme et la drogue, etc.
Bien entendu, il ne peut y avoir de ressources financières suffisantes, et donc de moyens à la hauteur des besoins sanitaires, sans une économie nationale performante et inclusive (lire la rubrique Économie du présent programme). En effet, c'est de l’économie que l’État tire ses ressources. Que ce soit par l’impôt ou par l’investissement public à caractère industriel et commercial. C’est aussi l’économie qui offre des emplois et autres sources de revenus aux personnes en âge actif, permettant ainsi de réduire le chômage, la pauvreté et, donc, la malnutrition et la maladie. C’est dire l’importance cruciale de l’économie pour la santé publique.
Il va également de soi qu’un système national de santé ne peut pas se réduire à la seule santé publique : il doit permettre l’exercice d’une santé libérale, c’est-à-dire privée, à côté du secteur public. Ce, pour permettre à ceux qui le peuvent financièrement d’exercer leur liberté de choix en matière de soins de santé et de favoriser la création d’emplois et de revenus pour les professionnels de santé que l’exercice de la médecine privée intéresse.
En aucun cas, cette dualité du système national de santé ne doit conduire à une santé à deux vitesses où ceux à faible revenu seraient moins bien pris en charge que les autres. Ce serait contraire au principe de l’égalité devant la santé, un droit humain fondamental.
Les conditions d’une telle santé performante existent-t-elles à Djibouti ? La réponse est malheureusement non. Sous nos cieux, la santé publique n’est ni de qualité, ni accessible à tous. Elle manque de ressources financières suffisantes. Elle manque de professionnels de valeur décemment rémunérés, situation qu’aggrave la fuite des compétences existantes. Elle manque de moyens techniques : locaux, équipements et produits de santé adéquats. Elle manque de gestion performante. La campagne connaît toujours un désert médical tandis que la corruption et la participation financière aux soins découragent les pauvres en ville. Quant à la médecine préventive et à l’éducation sanitaire, elles restent, en dehors des quelques actions périodiques de vaccination, largement à faire. La santé privée est en meilleur état que la santé publique à Djibouti mais elle n’est pas à la portée du plus grand nombre.
Pour se convaincre de l’état de notre système de santé, il suffit de faire le tour de nos dispensaires, hôpitaux et autres cliniques privées, de regarder leur répartition territoriale, d’observer l’action médicale préventive et la liste des pathologies évitables, ou encore de considérer le nombre de départs pour soins à l’étranger chez les personnes qui en ont les moyens. A commencer par nos gouvernants.
Les conditions d’une santé pour tous restent donc à réunir dans notre pays. Plusieurs décennies après l’Indépendance nationale du 27 juin 1977 !
Notre volonté politique est de réaliser cette santé que nous souhaitons pour notre peuple. Cela implique notamment de :
- Rendre le système de santé accessible, prévisible, efficace, efficient et centré sur le patient et ses besoins ;
- Garantir la couverture sanitaire universelle en assurant la disponibilité, la gratuité et la qualité des services de soins de santé primaires ;
- Offrir des services de soins secondaires et tertiaires abordables et de qualité ;
- Garantir l’accès des démunis aux soins secondaires et tertiaires nécessaires ;
- Valoriser les métiers médicaux et paramédicaux à la fois au plan de la formation, du salaire et des conditions générales de travail ;
- Renforcer l’efficacité des services des urgences ;
- Mettre l’accent sur l’éducation préventive à la santé, ainsi que sur le dépistage et l’intervention précoce ;
- Réhabiliter l’hygiène du milieu de vie pour prévenir les maladies que sa dégradation entraîne ;
- Encadrer et inscrire le secteur privé de santé dans la politique publique de santé.
La jeunesse est l’avenir de la Nation, car sans les jeunes la société ne se renouvelle pas. Une jeunesse développée est donc une société assurée de son avenir.
A Djibouti, les moins de 35 ans représentent plus de 70% de la population générale avec un fort taux de chômage estimé à 70%.
En faveur de la jeunesse, la première idée qui vient à l’esprit est, à juste titre, l’éducation. Laquelle est indispensable aux jeunes pour qu’ils se socialisent (se construisent socialement autour des valeurs et de la culture) et acquièrent du savoir (par un processus qui les implique). Elle passe par la famille comme par l’école. Mais la socialisation familiale et scolaire ne suffit pas pour que les jeunes deviennent des adultes à part entière, c’est-à-dire pleinement insérés dans la société. Ils ont besoin des moyens de leur insertion.
De fait, en plus du savoir académique, des valeurs et de la culture (au sens de manières de penser, de sentir, de croire et d’agir), la jeunesse a besoin d’autonomie économique, condition de son insertion sociale. Sans cette autonomie économique, la jeune personne se retrouve matériellement démunie, moralement fragilisée et socialement marginalisée. D’où l’importance de la formation professionnelle. Pas une formation au rabais, plaquée depuis l’extérieur, figée et peu efficace. Il faut à la jeunesse une formation en pleine prise avec les besoins de l’économie. Les jeunes doivent être formés pour développer leurs talents et s’adapter à une économie sans cesse travaillée par les évolutions de toutes sortes. Clairement, il faut leur permettre de s’insérer dans l’économie à la sortie du dispositif de formation et de s’adapter aux évolutions de cette même économie. A l’évidence, la formation ne doit pas se limiter à la phase initiale, ne viser que la primo-insertion professionnelle, elle doit être en permanence disponible pour répondre à la demande de perfectionnement, de reconversion ou de développement personnel de la jeune personne devenue adulte. C’est une formation tout au long de la vie qu’il nous faut. Et, notons-le, cela n’est pas en contradiction avec le principe de l’apprentissage au long de l’âge qui régit le rapport au savoir chez les pasteurs nomades que nous sommes.
Professionnellement formée et économiquement autonome, la jeune personne est bien plus à même de s’insérer socialement et de se vivre en adulte épanoui et citoyen.
Ainsi, le MRD propose de :
- Prioriser au plus haut point la lutte contre le chômage des jeunes, ce qui passe notamment par la mise en place d’un dispositif efficace d’accompagnement (dont la formation) à l’emploi et à l’entrepreneuriat, le choix entre emploi et création d’entreprise étant laissé au (à la) jeune. A cet égard, la formation à l’entrepreneuriat doit être promue parallèlement à la mise en place d’un financement adéquat des projets de création d’entreprises. Pas une promotion de façade du genre Centre du Leadership et de l’Entrepreneuriat (CLE) qui, à peine né, est pointé du doigt pour déficit de transparence, mais une promotion inclusive et efficace visant à développer notre tissu économique à générer emplois et revenus. Nous voulons faire de la jeunesse le fer de lance du développement ;
- Rendre les programmes de formation plus adéquats à la demande du marché du travail ;
- Prévenir et combattre la consommation des drogues et la délinquance, ce qui passe notamment par l’encouragement du goût du sport, de la bonne hygiène de vie et de la culture ;
- Rendre accessibles les services de santé pour les jeunes ;
- Promouvoir la participation de la jeunesse à la vie démocratique et publique, notamment à l’échelon local ;
- Améliorer de manière responsable l'accès aux technologies de l’information et de la communication pour les jeunes ;
- Sensibiliser et éduquer les jeunes à la protection de l’environnement ;
- Protéger et insérer dans la société les jeunes à besoins spécifiques dont les handicapés. Ils doivent trouver leur pleine place dans la vie éducative, formative, professionnelle, économique, sociale, sportive et culturelle du pays.