La politique n’est ni mensonge, ni mauvaise volonté. Elle n’est ni trahison, ni trucage. La politique ne doit ni se couvrir de ridicule, ni céder au cynisme. Elle n’est pas à manger. La politique est noble. C’est l’art de gérer la cité, de servir ses semblables. La politique, voyons-nous, est affaire d’idées, d’action, de résultats.
S’engager en politique c’est, dès lors, mettre en avant des idées, les confronter à d’autres vues, en accepter la critique. C’est se soumettre à la sanction populaire. Laquelle intervenant généralement par voie électorale.
Le politique propose, le peuple dispose. Politique ne rime-t-elle pas alors avec liberté et démocratie ?
Proposer, le PRD, devenu MRD, l’a toujours fait. Il le refait aujourd’hui. A vous d’en juger.
En ce début du troisième millénaire, trente ans après l’Indépendance dont nous avons, par un 27 juin 1977, accueilli l’avènement dans l’allégresse générale, notre pays se débat dans des difficultés d’un autre âge.
La liberté retrouvée a tôt été confisquée par une minorité de prédateurs sans culture publique ni bon sens bâtisseur, qui ont dévoyé le nouvel État. Le pouvoir est devenu personnel et patrimonial, sa transmission dynastique. Il s’en est suivi, pour le peuple, misère matérielle et détresse morale. Sur fond de répression aveugle et incessante. Où que l’on tourne son regard, la République de Djibouti offre l’insoutenable spectacle de la dégradation, du non-droit et de l’angoisse devant l’avenir.
C’est dire si notre pays présente, du fait de l’irresponsabilité de gouvernants à nous imposés par les aléas de l’histoire, tous les signes d’un grand rendez-vous manqué. Celui de l’édification.
Il s’ensuit que nous nous trouvons aujourd’hui confrontés à un défi vital : être ou ne pas être. Etre un Etat moderne digne de ce nom, un Etat de droit et de démocratie. Etre une société juste, libre et fraternelle. Etre un pays en paix, assis dans ses valeurs fondamentales et ouvert au monde.
La situation est, on ne le répétera jamais assez, fort grave. Elle nous interpelle toutes et tous, car nous sommes toutes et tous concernés. Elle interpelle tous les Djiboutiennes et Djiboutiens, toutes les consciences du pays, en particulier les acteurs politiques dont la raison même d’être est de faire en sorte que marche correctement la collectivité.
Le Mouvement pour le Renouveau démocratique et le Développement (MRD), ancien Parti du Renouveau Démocratique (PRD), grande formation légalisée de l’opposition, ne s’est jamais dérobé devant ses responsabilités. Il a toujours eu à cœur de les assumer de son mieux. Pour nous, la politique n’est pas une affaire de ridicule permanent, ni de mauvaise foi et de cynisme. Le pouvoir n’est pas un vulgaire moyen d’enrichissement illicite, ni un instrument de répression arbitraire. La politique est trop noble pour se rabaisser à de telles vilenies. Elle est engagement, service de l’intérêt général. Elle est dévouement, abnégation. Elle est liberté, réflexion. Elle est action et résultats. La politique est bonne gouvernance, responsabilité (accountability en anglais).
Nous mesurons la gravité du défi devant nous, la profondeur des problèmes, l’importance des enjeux.
Chers compatriotes, il nous faut réfléchir et agir à un double niveau. Car il nous faut d’abord parer au plus pressé, puis agir en profondeur.
Il nous faut d’abord arrêter l’hémorragie actuelle et remettre sur pied le pays.
Nous pensons que cela passe par une action concertée associant toutes les forces vives de la nation.
Sans attendre, il nous faut restaurer l’Etat dans sa crédibilité et son équité. Le restaurer dans son rôle de protecteur de la liberté et de la démocratie, des biens et des personnes. Il faut en faire un Etat qui redonne confiance et aide ce peuple en détresse à sortir de la terrible ornière où l’a plongé le règne de la confiscation et de la spoliation. Il nous faut une administration (au sens large, qui inclut le système national de sécurité) respectueuse de la Loi, intègre et transparente, accessible et efficace, où l’homme qu’il faut soit à la place qu’il faut. Une administration où l’égalité des chances et la récompense du mérite ne soient pas des mots vides, où l’agent public puisse vivre de son salaire. Une administration qui sache rester politiquement neutre pour être au service de tous.
Pour reprendre économiquement vie, il nous faut instaurer un climat général (politique, social, institutionnel, juridique, etc.) propice au retour de la confiance, encourager fortement les investissements générateurs d’emplois et de revenus, ne pas hésiter à engager l’Etat où il faut pour le temps qu’il faut. Il faut prendre à bras-le-corps les dossiers de l’énergie, de l’eau et des infrastructures, le problème de la formation professionnelle, notamment des jeunes. Il faut nous atteler avec conviction à la question de notre positionnement économique comme place commerciale et financière forte.
L’urgence sociale nous commande, pour sa part, de nous attaquer à la misère et à la pauvreté. Il faut engager une politique volontariste de travail, et pas seulement salarié. Une politique qui ne néglige aucune couche sociale, aucun genre, qui accorde leur place aux femmes comme aux hommes, aux jeunes comme aux moins jeunes. Il faut intégrer tous les talents, toutes les aptitudes. Il nous faut combattre le coût scandaleusement élevé de la vie. S’impose, à cet égard, une véritable politique d’approvisionnement, une régulation du marché des produits de base et des denrées de première nécessité, un contrôle sérieux des prix homologués. Réhabiliter le système éducatif, la santé et la culture, voilà une autre priorité urgente qui commande d’agir. Il faut aussi une gestion de l’espace national où urbanisme, environnement et habitat fassent bon ménage. Urbanisme ne rime point avec anarchie et ghettos, environnement avec dégradation, habitat avec pénurie, ruralité avec exode. Il est possible de gérer harmonieusement la ville, de trouver un meilleur équilibre entre milieux rural et urbain, de protéger l’environnement et d’en vivre à la fois.
En parant au plus pressé, nous devons faire preuve de détermination, de tact, d’imagination, d’ouverture d’esprit. Nous devons mettre en commun nos intelligences, nos expériences, nos forces. Regarder autour de nous, vers le reste du monde et nous en inspirer lorsque cela est possible. Savoir que plus nous serons déterminés à nous aider, plus attentifs seront nos amis.
Parer au plus pressé sans jamais perdre le souci du dialogue et de l’adhésion. Politiques, syndicalistes, opérateurs économiques, femmes, jeunes, associatifs, artistes et écrivains, intellectuels, religieux, professions libérales ou non, autres membres de la société civile, citoyens ordinaires, civils et corps en uniforme, etc. la participation de toutes et de tous est nécessaire à ce sursaut national.
Cependant, l’urgence ne suffit point. Il faut aussi de la profondeur. Il importe d’engager une réflexion d’ensemble, analyser les causes de notre peu enviable sort et dégager des pistes de transformation. En d’autres mots, il nous faut formuler le projet politique alternatif que la situation appelle. C’est ce que nous tentons dans les lignes qui suivent.